Mexique

26 Avril 2017

Basse Californie, Nord.

Traversant de nouveau la péninsule, nous rejoignons d'abord San Ignacio, oasis au centre de la péninsule. C'est une jolie petite ville, touristique, certes, mais très vivante. Ancienne mission jésuite, l'église est sobre, avec des murs épais et un petit jardin botanique à côté.

Dans ce jardin, on trouve essentiellement des cactus mais aussi des plantes médicinales, le tout soigneusement répertorié.
C'est la Semana Santa, la semaine sainte, et il y a beaucoup de mexicains en vacances. Les voitures sont chargées de bagages ficelés directement sur le toit (il y peu de voitures avec galerie de toit au Mexique). Parfois, il y a d'autres bagages ... (ci-contre, le chargement est composé de ... trois toilettes mobiles !)
Nous arrivons à Mulegue, sur la Mar de Cortes. Mulegue est connue car très touristique. Nous aurons la surprise de trouver une toute petite ville où il n'y a en fait pas grand-chose. Nous cherchons de l'eau, chose assez difficile à trouver à Baja, région désertique. Un policier nous indique un robinet, en face des pompiers. Nous le trouvons, fixé sur le mur d'une maison.
Pendant que nous faisons le plein (130l), un homme arrive et nous dit que nous nous trouvons dans son jardin. Nous nous confondons en excuses mais il nous laisse quand même remplir notre réservoir, nullement fâché. On retrouve là un trait de caractère des mexicains qui vont toujours se montrer aimables et serviables. Il nous fait remarquer que l'on est chez lui, c'est normal, mais ne nous empêche pas de prendre l'eau. Il refusera même les pesos que je voulais ensuite lui donner.

De Mulegue vers le sud, sur la route de Loreto, se trouve la Bahia de Concepcion. Tout au long de cette baie il y a des plages de sable. Chaque plage est remplie de véhicules, tentes, camping-cars, rangés dans la plus complète anarchie.
Chaque coin de sable libre est occupé par une tente, une table, ou une voiture. Les campeurs sont essentiellement des mexicains. Nous pensions trouver des américains mais ils sont en fait assez rares. Quant aux voyageurs comme nous, ils sont inexistants. Les familles mexicaines se regroupent là pour la journée ou pour plusieurs jours.

Nous baignons dans des odeurs de barbecue et un fond sonore très rempli : musique émanant de différents endroits, jetski, quads, 4X4, sans oublier les cris et rires de tout ce monde. Nous fermons nos oreilles autant que nous le pouvons pour survivre ... (ci-contre : il n'y avait qu'un trou de boue , le 4X4 l'a ciblé. Drôle de jeu...)

Mais la mer est belle, turquoise, transparente et limpide, bien qu'un peu fraîche pour nous. Coincés entre d'autres véhicules, nous passons là malgré tout quelques jours de vacances. (Vue de la fenêtre arrière du fourgon)
Quand le soleil se couche, des feux de camps apparaissent et le son d'une guitare résonne au loin. Puis tout le monde s'endort, parfois bien tard (!), et le silence de la nuit descend sur la plage... La seule musique que l'on entend encore est le clapotis des vagues...

Quand nous arrivons en ville le lendemain, on nous dit que les dernières baleines sont parties depuis une semaine. Nous avons donc eu beaucoup de chance de les voir à la Laguna San Ignacio car elles étaient déjà prêtes à quitter les eaux mexicaines.
Et nous partons pour une nouvelle traversée vers la Mar de Cortès, à San Felipe. Nous rencontrons Tiago, un sympathique cycliste belge qui arrive d'Alaska et se dirige vers la Patagonie. Il est midi, c'est l'heure où Tiago s'arrête de rouler à cause de la chaleur. Installés au frais dans le fourgon, nous avons bien des choses à échanger et le temps passe trop vite. Klaus s'impatiente car nous avons encore pas mal de route devant nous, dont 30 km de piste, et il est pressé de s'arrêter avant la nuit.
Ce seront en fait près de 60 km de piste, en très mauvais état car une route est en construction à côté. Nous arrivons sur un nouveau goudron à la nuit tombante et nous arrêtons sur un gigantesque parking tout neuf, avec une très grande sculpture mais ... ni poubelles, ni toilettes ( nous remarquerons cette incongruité assez souvent sur des routes pourtant toutes neuves).

Au Mexique, la lumière de fin d'après-midi est magnifique ! (Notons que le soleil se couche assez tôt) Moins violente que durant le jour, très claire, elle illumine le paysage d'une douce nuance rosée. C'est le moment de la journée que nous préférons, bien que ce soit aussi le moment où la fatigue de la conduite se fait le plus sentir, et où il faut de plus chercher un endroit pour la nuit.
Le lendemain, nous longeons la côte sur une cinquantaine de km, à la recherche d'une plage où nous pourrons nous arrêter quelques jours. Les accès à la plage sont tous privés, réservés à des trailer-parks ou des campings. En fait, ces trailer-parks ressemblent à des terrains de camping où camping-cars et immenses caravanes sont installés à l'année, parfois même de façon quasi définitive. Ce sont essentiellement des américains, parfois des canadiens, qui viennent là passer l'hiver. Ces endroits peuvent être assez simples, ou très luxueux. On y rencontre peu ou pas de vacanciers mexicains.
Le premier camping que nous essayons, Playa hermosa (Jolie Plage), est un petit village dont la plupart des magasins et maisons de vacances sont fermées. Nous sommes à la fin de la saison et beaucoup d'américains sont déjà repartis chez eux. Le deuxième endroit nous réserve une autre surprise : il n'y a plus de mer , rien que des immenses bancs de sable !
Près de San Felipe, nous trouverons enfin un camping surplombant la mer où nous nous arrêtons plusieurs jours. Plusieurs jours à ne rien faire du tout, cela fait du bien ! Serge, un français habitant en Californie depuis plus de 50 ans, vient nous voir en voisin. Il habite une de ces immenses caravanes extensibles sur les côtés. On se croirait dans une petite maison tant il y a d'espace à l'intérieur.
C'est chouette de pouvoir parler français et de trouver un petit coin de France ici, car même si Serge a quitté la France depuis longtemps, il est resté un pur français. Grâce à lui et à sa télé, j'ai pu connaître sans délai les résultats du premier tour des élections présidentielles et suivre en direct les premières réactions en France.
Certains ont avancé une autre cause possible... Il y a des mines d'or un peu plus au nord, et il y a eu de fortes pluies. On pense que peut-être des réserves de produits chimiques auraient débordé et que le produit se serait écoulé dans la mer. Les industriels nient bien sûr. Mais ce n'est là qu'une supposition...
Serge nous parle de la faune environnante. Il y a, dans le désert à côté, des crotales. Je lui demande s'il sait que le nombre d'anneaux correspond à l'âge ? Il me répond que quand il voit un serpent à sonnettes, il détale en vitesse et ne compte pas les anneaux ! Il y aurait aussi des scorpions. Et dans la mer, des petites raies se cachent sous le sable et envoie leur aiguillon aux malheureux qui marchent sur elle ! Ça fait mal ! (peut-être aussi pour la raie, d'ailleurs) Et il y a également des méduses. J'ai vu plus tard, quand nous étions à Veracruz, qu'une araignée, la plus grosse jamais vue au monde, avait été découverte à Baja ! C'est beau la nature...

Continuant notre route vers le nord, Klaus donnera un grand coup de volant vers la droite peu avant Mexicali, la ville frontière avec les USA, et nous repartons plein sud, pour retourner vers ce Mexique où nous nous sentons si bien !
En fait, nous avons été un peu déçus par Baja. Peut-être l'enthousiasme vu chez certains touristes nous a-t-il fait en attendre trop. Nous avons rencontré certaines personnes pour qui Baja était le meilleur du Mexique. Ceux-là ne connaissaient en fait pas le continent et n'y étaient même jamais allés. Mais Baja n'est pas le Mexique. C'est une terre mexicaine que les américains se sont appropriés pour leurs vacances ou passer l'hiver au soleil pour les retraités. Comme c'est le cas pour le Maroc en Europe.
Baja étant peu peuplée, la proportion des américains dans la population est très grande. Et ils prennent beaucoup d'espace ! Dans les supermarchés ils parlent fort et occupent la place ; dans les excursions touristiques, ils sont devant ; ils construisent de belles maisons à côté des masures mexicaines, maisons trop belles qui ne cadrent pas dans le paysage et qui sont souvent fermées.

Serge nous dit que Baja est trop chaude et surtout beaucoup trop humide en été et dés le mois de mai tout le monde s'en va pour ne revenir qu'en octobre. Que devient Baja pendant ce temps-là ? Un pays fantôme vidé de « ses » habitants ? Il ne reste plus que les locaux, ceux qui sont de là et ne peuvent pas fuir la canicule, peut-être heureux d'un certain côté d'être débarrassés des envahisseurs et de se retrouver entre eux ?
Le paysage est certes joli en bien des endroits mais il y a aussi de grandes distances monotones dépourvues d'attrait. L'absence de parking ne permet pas d'apprécier vraiment les paysages superbes rencontrés parfois, surtout pour le conducteur qui doit rester vigilent dans les virages ou sur certaines routes dont le goudron peut être défaillant.

Notre séjour à Baja a certainement beaucoup contribué à la prise de décision d'arrêter notre voyage au Mexique et de ne pas aller voir les américains chez eux. Ici, on peut encore les fuir mais là-bas, il faudrait les supporter et les « rois du monde », ou ceux qui pensent qu'ils le sont, ne sont pas nos meilleurs amis.
Dans un trailer park, en compagnie d'un sympathique couple de voyageurs allemands, les seuls que nous ayons rencontrés depuis bien longtemps !
Alors ces véhicules commencent une deuxième vie, isolés dans le désert ou accolés à quelque masure de pêcheurs, avant de rouiller, abandonnés dans la nature. Et il y en a beaucoup trop !
Nous leur préférons, et de beaucoup ! les mexicains. Nous voulons terminer notre voyage dans un pays authentique, riche culturellement, un pays de soleil, avec des habitants ayant le soleil en eux comme sur leur peau...
Nous partons à Guerrero Negro, sur la côte Pacifique. C'est un haut lieu d'observation des baleines grises. Nous arrivons tout d'abord à la laguna. Tout est mort, déserté. Pas de baleine à l'horizon. Et personne. Nous en profitons pour passer là une de ces nuits que nous adorons, dans un désert total, avec le bruit des vagues en guise de Petite Musique de Nuit.
Les américains viennent soit en vacances de courte durée en voiture ou en avion, soit pour longtemps dans ces immenses camping-cars que nous ne connaissons pas chez nous, ou ces sortes de caravanes tractées par camions ou parfois simplement par des pick-ups. Ils sont installés dans des campings ou des camps de manière quasi définitive. Mais on en voit beaucoup trop ayant terminé leur vie américaine et qui restent là, transformant Baja en une poubelle pour camping cars, une poubelle qui ne sera jamais vidée.
San Felipe est au nord de la Mar de Cortès. La plage devient immense lorsque la mer se retire. Cela sera de plus en plus ainsi en allant vers le nord. On n'est pas loin de penser au Mont Saint Michel ! Cette année, six baleines et plusieurs dauphins se sont échoués sur les bancs de sable. On a enterré certaines baleines, on en a tracté d'autres vers le large ; elles sont revenues ... Deux se décomposent à 15 km au sud de notre plage. C'est la première fois en 10 ans que Serge voit des baleines échouées.
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