Argentine
De Mendoza à l'Uruguay. 5 février
2011.
Nous arrivons à Mendoza par une grande
chaleur. Nous nous réfugions au camping où nous bénéficions d'une excellente
connexion internet wifi et en profitons pour téléphoner à la famille et aux
amis qui nous croient de retour tant nous semblons proches d'eux. Après l'isolement
dû aux difficiles connexions de Patagonie, ces contacts sont un vrai bonheur.
Le soir, nous avons droit à un orage venant des hautes montagnes toutes proches.
Nous
nous arrêtons pour la nuit à Uspallata, agréable petite ville à 2000m. Les habitants
nous parlent du Dakar qui y avait fait étape en 2010 et nous imaginons cet endroit
paisible envahi de tant de véhicules et de monde, le temps d'une nuit. Nous
sommes aussi surpris car une bonne route goudronnée relie Mendoza au Chili et
la vallée étroite où elle chemine ne permet pas le passage d'une piste. Le Dakar
se ferait-il donc aussi sur le goudron??????
En
chemin, nous passons par le Puente del Inca. Cet ouvrage, dont on ne sait s'il
est œuvre de l'homme ou de la nature, est très impressionnant. Les incas ont
dévié le cours d'une source très chargée en sels, ferrugineux sans doute vu
la couleur, et le dépôt de sels a créé ce passage d'une rive à l'autre. Lorsque
le pont se détériorait, il suffisait de refaire circuler l'eau dessus et la
réparation se faisait d'elle-même. Ce pont était du temps des Incas le seul
passage d'une rive à l'autre.
Cette
eau possédait par ailleurs des propriétés curatives et un hôtel thermal se trouvait
directement sur la source ; chaque chambre y avait son bain thermal et la clientèle
n'appartenait qu'à des milieux très très privilégiés. L'hôtel
ne fonctionne plus depuis plusieurs décennies. A côté du pont, comme toujours,
nombre de boutiques de souvenirs ont établi leur quartier et certaines vendent
des objets pétrifiés par un séjour prolongé dans l'eau de la source.
L'après-midi,
nous arrivons près de ce géant qu'est l'Aconcagua, mais les nuages nous en cachent
toujours le sommet. Qu'à cela ne tienne ! Nous attendrons le lendemain ! Tôt
le matin, le petit coin de l'Aconcagua visible depuis notre parking apparaît
tout rose au lever du soleil dans un ciel sans nuage. Nous nous mettons immédiatement
en route, avant même l'ouverture du parc, et l'admirons du haut du mirador,
seuls, secondés par une thermos de café chaud car il fait quand même frais à
3000 m.
La
face sud présente un très grand glacier ; le glacier supérieur, appelé Seraqs,
a 300m d'épaisseur. Cette face sud est la plus difficile et seuls 1/3 des andinistes
la tentent. La plupart attaquent la montagne par ses faces ouest ou nord. On
remarque d'ailleurs l'existence de plusieurs voies « francesas ».
Les
trekkings sont nombreux et les trekkeurs plus encore ! Chaque jour, plus de
1000 personnes entrent dans le parc, et au moins 300 y restent plusieurs jours
en trekking ou pour faire l'ascencion. Les contrôles de sécurité sont rigoureux
ce qui n'empêche pas qu'il y ait chaque année de nouvelles victimes, 2 déjà
pour cette saison ; il y a trois ans la montagne avait pris 6 vies, une mauvaise
année, dit-on.
Des convois de mules montent chaque matin
vers 8 heures et redescendent vers 18 heures. Ils acheminent matériel
et sacs à dos des trekkeurs passant par une agence, ainsi que les vivres
pour ravitailler les deux camps situés à environ 6 et 12 heures
de marche. Celui qui part seul devra porter son sac... L'hélicoptère
effectue aussi plusieurs vols le matin pour acheminer du matériel.
Ces images sont dédiées
:
à Nicolas, amoureux de toutes
les montagnes
à Dominique Fiq. qui a failli
faire l'ascencion de l'Aconcagua...
Nous
passons la journée au parc puis redescendons passer une nouvelle nuit à Uspallata.
Une marchande d'olives et de produits dérivés nous offre, en plus
de son amitié, le traditionnel maté !
La route offre des paysages magnifiques ; les rochers sont rouges et sur des
dizaines de km s'étire une falaise qui ressemble à des remparts.
C'est
vers midi que nous arrivons à Mendoza ... Mendoza est une grande ville de ½
million d'habitants. Une chaleur écrasante règne sur la ville la plongeant dans
une vraie torpeur ; les magasins sont fermés, les rues sont désertes et ne circulent
que quelques touristes égarés qui viennent s'affaler sur les fauteuils à la
terrasse des bars, dégoulinant de sueur.
De
notre côté nous allons aussi de bars en bancs publics ombragés, évitant les
difficiles traversées de rues dans le soleil brûlant. La Plaza Espana, avec
ses magnifiques azulejos, est une halte délicieuse, tant pour les yeux
que pour la fraîcheur de ses fontaines. Quand Mendoza devait commencer
à revivre en fin d'après-midi nous avions rejoint notre camping pour une bonne
sieste.
Nous
y rencontrons un couple de retraités allemands en voyage depuis quatre ans avec
quelques séjours assez prolongés en Allemagne. Ils n'habitent
pas très loin de chez Klaus en Bavière et le rendez-vous est déjà pris pour
notre retour. Nous passons avec eux une agréable soirée où la fraîcheur de la
nuit nous tient éveillés jusqu'à deux heures du matin !
San Juan est notre prochaine étape et
décidés à ne pas commettre la même erreur qu'à Mendoza, nous entrons dans
la ville au petit matin. La ville ne connaît guère les touristes, impossible
de trouver une carte postale !
Dés l'après-midi, il fait
très chaud et chacun se met à l'aise à sa manière...
San
Juan est la ville de Sarmiento, ce fameux Sarmiento qui a donné son nom à une
rue ou un parc dans chaque ville d'Argentine. Né au début du XIX ème siècle,
issu d'une famille pauvre, il devient écrivain, puis gouverneur de la province
et enfin Président de la République. Il est surnommé « Le Président Maître d'Ecole »
car il a fait de l'éducation sa priorité.
Nous avons une pensée
pour Noël, cet autre maître d'école d'un petit village de Savoie qui s'éteignait
alors que nous visitions San Juan...
Bien
que les régions de Mendoza et de San Juan soient connues pour produire
le meilleur vin d'Argentine, nous ne faisons pas la traditionnelle visite des
caves ; la chaleur ne nous encourage guère à la dégustation,
d'autant plus que depuis notre départ, il y a plus de 9 mois, le nombre
de bouteilles de vin consommées se compte sur les doigts d'une main.
Nous
reprenons la route, l'air circulant permettant de mieux supporter la chaleur.
Nous quittons San Juan à 34° et après avoir roulé une heure, le thermomètre
affichait 38°. Le paysage est semi-désertique et ressemble au Sahel, ou … au
sud de l'Espagne en été. La Quebrada des Quilabras est sur notre chemin et nous
décidons d'y passer la nuit.
Une
sympathique jeune garde du Parc nous explique les différentes balades avec guides
et, voyant notre air peu décidé, nous propose une autre promenade que l'on peut
faire sans guide, avec un permis spécial ; et elle ajoute avec un sourire entendu
: « Vous serez seuls... ». Seuls nous le sommes déjà pour la nuit...
Après une rapide course pour voir la magnifique Quebrada rouge au coucher du
soleil, nous admirons les étoiles dans un ciel très pur, sans nuage et sans
aucune lumière de ville.
Klaus
y découvre une moitié de ciel non visible de chez nous, et des étoiles habituellement
à l'horizon chez nous se trouvant là en plein ciel. Et bien sûr la nuit est
très courte car on regarde les étoiles tard le soir et on se lève très tôt le
matin pour s'enfoncer dans la quebrada dont les roches sont vite chauffées par
le soleil et où la température peut monter jusqu'à 45°.
Il
est 6h30 quand nous nous mettons en route, l'heure limite de départ étant 10h.
Et c'est vrai que nous ne rencontrons les premiers promeneurs que quand nous
revenons à la voiture. Le ciel est un peu couvert, il fait donc moins chaud,
mais le photographe n'est pas content de ces nuages qui jettent de l'ombre sur
les rochers rougeoyant au soleil. De grands oiseaux planent au-dessus de nous
; aigles ou condors ? Difficiles de définir, l'un et l'autre étant présents
à cet endroit.

Nous quittons la quebrada dans l'après-midi
pour continuer vers l'est et Cordoba. Le paysage change et de l'herbe fait
son apparition, puis des arbustes et tout devient de plus en plus vert, l'herbe,
les arbres. En même temps, les routes désertes se remplissent de plus en plus,
de même que les villages où boutiques de souvenirs côtoient restaurants, hôtels
ou campings. Le changement est brutal ! et l'on se dit que nous avons de plus
en plus de mal à supporter la foule et les endroits touristiques... Nous sommes
dimanche soir et, à moins de 100 km de Cordoba, les routes ne sont déjà
plus qu'un serpent de voitures avançant au pas.
Un
ancien palais est par contre vaste, bien éclairé et mis en valeur, magnifique
! Il abrite des peintures d'artistes de Cordoba, d'origine diverses, italienne,
hongroise, française et bien d'autres qui montre que l'Argentine recèle
un impressionnant mélange de cultures européennes. C'est là
un endroit où on se sent bien...
Nous
attendrons le lundi pour visiter Cordoba et ferons une agréable pause de deux
jours dans son camping très tranquille. Un animal hybride entre chien et mouton
a établi ses quartiers près de notre fourgon. Il a des poils qui ressemblent
à de la laine de mouton et qui doivent lui tenir terriblement chaud ! Et personne
pour le tondre !!!
Le
mercredi nous nous lançons dans la grande ville de Cordoba, 1 ½ millions d'habitants...
Nous y circulons somme toute assez bien et mettons notre fourgon à l'ombre d'un
parking gardé. Cordoba ne ressemble en rien à Mendoza et San Juan. Ces villes
font une grande pause en début d'après-midi quand la chaleur devient trop forte
; les magasins ferment, les rues se vident, la ville est en stand-by.
A Cordoba, les rues sont très
animées, tous les magasins restent ouverts et la ville ne désemplit
pas de l'après-midi. Quel contraste ! Il faut dire aussi que le thermomètre
affiche près de 10° de moins que dans les autres villes.
La ville compte de nombreux monuments
historiques, églises et couvents.
Vous
connaissiez Interpol ? Voici Tourpol, la police touristique de Cordoba ! En
short, baskets et casquette , elle a cependant une arme pour veiller sur nous
tous ! Nous avons beaucoup de plaisir à circuler dans cette ville vivante, pourtant
très peu visitée par les touristes étrangers. Une petite parenthèse à
ce sujet : nous sommes très surpris du manque d'originalité de la plupart des
voyageurs qui prennent le même chemin, visitent les mêmes villes et délaissent
des endroits comme Cordoba, le Parc de Copiahue, la Quebrada de Quilabras et
bien d'autres endroits magnifiques.
En
entrant dans la cathédrale, une curieuse impression nous étreint … L'intérieur
est dans les tons jaunes et l'on se sent écrasé par un plafond trop bas, par
trop de dorures, par des piliers si énormes qu'ils forment presque une cloison
où d'étroits passages permettent de passer d'un côté de l'église à l'autre.
Une église où je ne me sens pas bien et que je me dépêche de fuir. Curieusement,
il en sera de même dans la plupart des autres églises de Cordoba.
Avant
de quitter Cordoba, il nous faut remplir notre bouteille de gaz. Nous n'avons
pas d'adresse et on nous envoie vers un petit commissariat de quartier. Tout
le monde se met en quatre pour trouver une adresse. Pour en finir, après de
nombreux coups de téléphone, un policier monte dans le fourgon et nous guide
vers une maison d'habitation devant laquelle sont déposées quelques bouteilles
de gaz.
Le remplisseur demande alors à l'autre ses 100 pesos pour le pari. Mais
l'autre répond en riant qu'on ne peut pas parier en présence d'un policier !
Une bonne ambiance règne parmi ces gens sympathiques, qui se sont bien amusés
pendant une petite heure et ne voudront même pas que l'on paie.
A
l'est de Cordoba, la région est très agricole et ce ne sont que longues étendues
de blé, de maïs et de soja. La verdure contraste avec les paysages secs et déserts
de la région de Mendoza et San Juan. Et nous arrivons à Carcarana pour faire
une nouvelle visite à nos cousins d'Argentine
! (voir article : Argentine/Buenos Aires)
Nous
les attendons dans le camping local, très bondé et très bruyant. Nous prenons
conscience que l'art du campeur est de pouvoir vivre dans son petit monde à
lui, en faisant abstraction des bruits environnants. Pas de chance pour nous
! Nous avons pris l'habitude de nous ouvrir vers l'extérieur afin de profiter
des bruits de la nature … Chaque moto, voiture ou mobylette au pot d'échappement
trafiqué ou défaillant (et il y en a beaucoup !), chaque musique arrivant de
tous les côtés à la fois (et différente bien sûr) sont autant d'agressions de
moins en moins supportables.
Les camping-cars argentins sont en général
de longs véhicules, voir des bus même, dont la carrosserie a été entièrement
revue, ce qui donne parfois aux véhicules des dimensions gigantesques !
Et nous retrouvons enfin nos cousins
d'Argentine ! Leilen et Ricardo et leur fille Valentine, Carmen, la mère de
Leilen, et tout le reste de la famille.
Leilen a modernisé sa boutique ouverte chaque jour, dimanche compris, de 9h
à minuit ! Les clients se succèdent pour acheter dans cette petite boutique
où l'on trouve...tout !
Au
réveil, nous découvrons un ciel complètement dégagé et décidons d'aller tout
de suite vers le Chili car à la frontière entre Argentine et Chili se trouve
l'Aconcagua. Cette montagne est bien peu connue chez nous et pourtant, du haut
de ses presque 7000 m, elle domine les deux Amériques. Le Mt Mc Kinley culmine
en Amérique du Nord 700 m plus bas.
Nous
nous retrouvons tous autour d'une parrilla, le barbecue argentin. Après la journée
passée ensemble, nous les quittons avec émotion pour rejoindre la frontière
de l'Uruguay.
Merci à vous, mes
cousins argentins, pour votre accueil, votre gentillesse, votre affection.
Gracias a vosotros, amigos,
mis primos de Argentina !
Transvaser
le gaz d'une bouteille à l'autre n'est pas simple et après de nombreux essais
où nous baignons dans une forte odeur de gaz, un jeune parie 100 pesos qu'il
réussira. Et les voilà qui bricolent pour remplir notre bouteille. Tout
se fait dans le calme et la bonne humeur, même si le gaz liquide à tendance
à déborder. Pour en finir, on demande à Klaus d'essayer si ça marche et tous
les visages s'illuminent d'un bon sourire (je pourrais même dire s'allument...)
en voyant apparaître la petite flamme.