Equateur

24 décembre 2016.

Partant plein est vers l'Amazonie, nous arrivons à Misuhualli, petite ville touristique au bord d'un rio. Au début nous avons presque peur en voyant le nombre d'hôtels et de restaurants. A peine avons-nous stationné le véhicule qu'on nous propose déjà de nous emmener faire un tour sur le rio. Il y a beaucoup de démarcheurs.

S'il est demandé de ne pas les nourrir, eux ne sont gêneront pas pour trouver autre chose que les fruits qui leur sont donnés. Ainsi, alors que nous étions assis dans un restaurant, nous voyons un très vieux singe arriver avec un sachet plastique qu'il avait chapardé. Il le pose sur une table, l'ouvre et s'en va avec le super bifteck qu'il contenait. Le riz ne l'intéresse pas.
Aussitôt un jeune singe arrive, voit qu'il ne reste que le riz et s'applique à l'éparpiller de sa main. Il en met partout ! Puis il s'en va... On ne se lasse pas de regarder leurs « singeries » !
Nous allons visiter la communauté de Shiripuno. Nous franchissons un long pont suspendu à une voie, puis arrivons sur l'île. Un chemin entre les bananiers et autres arbres nous permet d'accéder au bord du rio pour nous garer, puis d'entrer dans la communauté.
Il y a de cela plus de 15 ans , un indien (riche) de cette communauté a fait don de plusieurs hectares à sa communauté. Le travail y était rude, les hommes devenaient plus ou moins alcooliques, les chercheurs d'or dans le rio tombaient malades. Le frère du chef s'était marié à une française qui, voyant les conditions de vie misérables de ces gens, leur a proposé de s'en sortir en s'ouvrant au tourisme.

Les femmes ont pris les choses en main, ce lieu charmant est né et a ouvert ses portes aux touristes assoiffés d'exotisme. Ce qui est parfaitement réussi ici est la manière dont ces femmes présentent les coutumes ancestrales. Nous verrons des danses traditionnelles, la Pierre Sacrée, le jardin où poussent de-ci, de-là les plantes médicinales, la fabrication du chocolat et celle de la chicha.
Le projet, commencé il y a onze ans avec une dizaine de femmes, regroupent à présent plusieurs communautés et 35 femmes adhèrent au projet. La communauté de Shiripuno est proche du village de Misahualli, ce qui permet aux enfants d'aller à l'école. Certaines communautés sont très éloignées et l'espagnol n'y est pas parlé, les enfants ne vont pas à l'école et l'isolement est très grand. En rejoignant le projet, les femmes apprennent l'espagnol et les enfants accèdent à l'instruction.

Un boa constrictor encore jeune est la mascotte de la communauté. Cela permet de faire un peu d'argent de poche car la photo coûte 1 dollar ! et il y pas mal de monde qui passe ici et prend le boa dans ses bras ou autour du cou. Quelle étrange sensation quand le serpent ondule derrière la nuque... (Sur la photo, j'ai des peintures indigènes sur les joues)
Nous rencontrons deux français, Sébastien et Mathieu, qui habitent Medellin en Colombie. Ils réalisent dans cette communauté un travail digne d'intérêt, un livre qui répertorie les plantes médicinales utilisées depuis toujours par les « médecins » de la communauté. Toute la pharmacopée se trouve dans le jardin.
Ils pourront tout savoir grâce à la femme-médecin, qui ne parle que quichua (et non pas quechua), et de sa fille qui sera l'interprète et a déjà beaucoup appris de sa mère. Cette communauté voit que ce savoir va se perdre et accueillent avec plaisir le travail de Sébastien et Mathieu. Nous attendons avec impatience la publication de ces recherches ! Ces deux jeunes hommes sont en plus fort sympathiques et nous finirons avec eux cette journée autour de quelques bières.
Si notre rencontre avec ces deux jeunes sympathiques nous a laissées une impression très agréable, il n'en est pas de même de notre visite à la communauté. L'élaboration du cacao en particulier. Après avoir récolté les cabosses, avoir fait sécher les fèves pendant trois jours au soleil, on les moud avec … un moulin comme celui que l'on utilise chez nous pour les noix, mais plus fin. C'est vrai que traditionnellement on faisait cela avec une pierre (c'était peut-être cela que l'on voulait voir?). Puis on mélange cette poudre avec du lait en poudre (?) et du sucre blanc. Dans un pays où la panella, bloc fait avec de la canne à sucre pure, est très largement utilisée, on s'étonne de voir les natifs utiliser du sucre blanc !

Quant au lait en poudre, est-ce Nestlé ou Gloria ? Bref nous avons payé 15$ pour apprendre qu'en Amazonie on fait le chocolat comme nous le faisions dans notre enfance avec une cuillère de cacao Banania ou Van Houtten, du lait ( chez nous il était frais), et du sucre.
Bon, on aura quand même eu droit à la dégustation de papaye couverte de "notre" chocolat chaud, bien que cela fasse cher la papaye...
Nous sommes garés à côté de l'Hostal France-Amazonie tenue par Antoine, un jeune français bien sympathique. Le jardin de cet hôtel est délicieux et Antoine y travaille avec soin. On s'y promène dans une jungle où chaque plante est à sa place, mise en valeur, sans excès de végétation.
Le lieu est agréable, paisible. Bon, sauf ce jour qui était le dernier jour d'école à côté et où l'on criait à tue-tête dans les hauts- parleurs !
et le coin bar près de la piscine est des plus accueillants.
Nous emmènerons Emilio, le fils d'Antoine, qui va rejoindre sa mère pour les vacances scolaires. Nous prendrons une piste, très jolie selon Antoine. Et puis, il y a aussi un autre passager, le chat d'Emilio qui voyage dans un carton. Enfin, ça, c'est ce qu'on nous a dit ! Car à peine passés le pont, le chat avait déjà fait un trou et essayait de sortir. Je me suis demandée si ce n'était pas une blague d'Antoine de nous dire que la route était jolie, car moi, j'avais les yeux braqués sur la tête du chat et essayais de l'empêcher de sortir .
Et Klaus a eu une idée géniale ! Nous avons des hamacs qui sont faits en filets. J'ai donc emprisonné le carton et le petit chat du même coup. Calmé, il est ensuite resté tranquille, les deux pattes avant sur le carton, les pattes arrière dans le vide dans le carton, et parfois il s'endormait la tête contre ma main. (remarquer les yeux du chat bleu d'un côté et vert de l'autre).
Calme, confiant, nous avons pu le sortir du carton et le mettre entre Emilio et moi, et il n'a plus bougé. J'ai donc pu admirer le paysage, les arbres immenses, les fougères géantes et les nombreuses fleurs dans la forêt et devant les maisons.

Nous nous sommes allés nous garer devant l'église, l'un des seuls endroits accessibles et plats de cet endroit. Devant l'église, avant la messe, les gens ont voulu savoir ce que nous faisions, d'où nous venions, où nous allions... Sans doute avaient-ils peur de ces inconnus. Ils nous ont permis de dormir là, mais quelle réticence !
Il faisait déjà nuit quand nous avons « livré » Emilio à sa mère. Un chien aboyait et faisait partie du comité d'accueil, alors le chat s'est cramponné à moi de toutes ses griffes pour ne pas sortir. J'aurais aimé le garder mais Emilio et Klaus s'y sont tous deux énergiquement opposé, chacun pour ses propres raisons.... le chat est donc parti avec Emilio. Sa mère nous a souhaité la bienvenue en Equateur !
Une bande de gosses de moins de 10 ans n'a pas tardé à apparaître pour accrocher les portières, taper sur le fourgon. Les adultes de l'église, dont le prêtre je crois, m'ont dit « ce sont les enfants » d'un air résigné où se lisait l'impuissance de tenir ces gamins mais... les adultes avaient-ils vraiment la volonté de les retenir ?
Quand les gamins ont lancé des pierres sur le fourgon, la messe allait commencer et nous, nous sommes partis chercher un autre endroit plus calme. A Shiripuno, les natifs profitaient largement des touristes mais au moins avaient-ils appris à leur enfants à leur sourire et pas à leur jeter des pierres.
C'est sur cette note amère que le lendemain, sous une pluie battante, nous avons fait la route jusqu'à la Colombie. C'était le 24 décembre. Joyeux noël !
Mais cette impression désagréable s'effacera vite sous le charme de cette petite ville tranquille dont l'un des grands attraits touristiques sont les singes ! Il y en a partout dans la ville mais, ainsi que nous le disait Antoine (voir plus loin), ils sont très mal élevés !
Ici, c'est un petit coin de France en Amazonie. On peut s'asseoir sous un abri pour regarder couler le fleuve, les chambres d'hôtes sont des petites maisons séparées

Avec le boa payant pour chaque photo, boa soigneusement enfermé (et baillonné avec un scotch transparent...), que l'on fait sortir pour que le touriste découvre la vie sauvage qui fait passer « par hasard » l'animal au moment où le touriste est là, bref on se rencontre que le Dieu de cette communauté est devenu le même que dans nos pays civilisés, c'est le Dieu Dollar !

Nous en rapporterons néanmoins de jolis films et photos que nous n'aurions jamais pu prendre autrement. Et puis, autant que ce soit les natifs qui en profitent plutôt que les agences de tourisme organisés.

(ci-contre, papayer) (ci-dessous, le cacao : la fleur, la cabosse sur l'arbre, la cabosse ouverte sur la pulpe qui contient les fèves)

Note de l'auteur : les indiens n'aiment pas que l'on les désigne ainsi. Ce nom d'indiens leur a été donné par les colonisateurs espagnols qui étaient partis à la recherche des Indes. Les premiers indigènes rencontrés, ils les ont appelé indiens. Le terme plus juste à employer est natif.
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