Pérou
Une grande journée de voiture nous mène, à travers les paysages les plus variés,
au sud de Lima. Une journée de plus de 500km, avec en plus la traversée de Lima.
Nous devons d'abord franchir de nouveau les Andes par un col à 4000 m puis c'est
la descente habituelle vers l'océan avec d'abord la végétation luxuriante faisant
suite aux cailloux des hauteurs puis nous arrivons dans une vallée au paysage
assez étrange ; le fond de la vallée a une allure d'oasis avec une profusion
de cultures et d'arbres fruitiers et sur les collines, il n'y a plus que des
cailloux.
Pisco. 15 octobre 2010.
Nous quittons Huaraz et les magnifiques
sommets de la Cordillère Blanche.
Nous
rejoignons le pacifique et la Panamericana et c'est de nouveau le triste désert
côtier et son éternel ciel gris et brumeux. Assez irréel, nous traversons des
zones de brouillard alors que la route nous mène au sommet de quelque dune.
Ce pourrait être joli pour ceux qui comme nous aime le désert...
Mais il y a aussi ces hangars si nombreux ! qui s'alignent les uns à côté des
autres et où se pratique l'élevage du poulet... Sur le sol, ils sont serrés
les uns à côté des autres, sans doute les ailes coupées car ils ne volent pas,
nourris par des silos alimentés par de gros camions.
Nous
sommes arrêtés par la police dans un village pour « excès de vitesse et dépassement
interdit ». Klaus ne conteste pas et très souriant accepte qu'il ne respectait
peut-être pas le 35 km/h (nous étions sans doute à 40) et qu'il a bien dépassé
ce camion chargé de canne à sucre pratiquement à l'arrêt. Dire qu'il accepte
est d'ailleurs vite dit... Le policier se rend très vite compte que ses tentatives
d'intimidation ne sont guère efficaces, Klaus gardant un éclatant sourire amical
et ne comprenant pas un mot d'espagnol.
Moi non plus d'ailleurs. Aucun stress chez nous ; c'est gênant pour la police
! Les très longues explications du policier sur la dangereuse conduite de Klaus,
la nécessité de payer l'amende (dont le montant ne nous sera jamais révélé)
dans une banque en ville, ce que nous acceptons d'emblée, d'autant plus que
le policier n'a toujours pas rempli une ligne de la contravention .
Arrangeant,
il nous dit que l'on peut payer directement chez lui, mais, ne voulant pas le
déranger, nous répondons qu'il n'y a pas de problème pour payer à la
banque à Pisco. Le sourire n'a toujours pas quitté nos visages et le
papier n'est toujours pas rempli... il retourne vers son collègue qui nous rapporte
plus tard nos documents, nous souhaite bon voyage et nous recommande plus de
prudence, avec un bon sourire et une chaleureuse poignée de main. Les nombreux
véhicules qui nous ont dépassés pendant ce temps à plus de 70 km/h n'ont inquiété
personne...
La
traversée de Lima, une ville de 7 millions d'habitants se passe très bien, du
moins sur la moitié du parcours sur une autoroute, toujours tout droit. Puis
cela se gâte ! Il y a des travaux et des déviations sur des rues bien plus petites
avec un trafic de plus en plus rapide et dense. Très vite j'adopte la voie du
milieu (c'est à dire le siège du centre) pour échapper au stress des autobus
nous frôlant à toute vitesse (relatif d'ailleurs dans les embouteillages). Quand
on demande notre route à des policiers très relaxes, c'est sans stress qu'ils
prennent le temps de nous répondre, indifférents au concert de klaxons que provoque
notre arrêt.
Nous devons d'ailleurs dire toute notre
admiration pour les policiers de la circulation en Amérique Latine, souvent
des femmes, que l'on trouve au milieu de la rue, dans une circulation dingue,
frôlés à tout moment par des voiture rapides, d'énormes bus ou de gros camions,
et qui continuent sans stress apparent à siffloter dans leur sifflet et à
gérer la circulation au milieu des coups de klaxons.
Nous sortons de Lima. Comme à l'entrée
de la ville, nous retrouvons les dunes prises d'assaut par des constructions
assez sommaires. Lima est construit dans le désert côtier. Cela ne se voit
pas dans la ville, mais dés la banlieue où le sable des dunes réapparait.
Heureux
d'avoir quitté cet enfer urbain, nous nous arrêtons pour la nuit sur la plage
d'une petite ville et nous endormons, bercés par le fracas des énormes vagues.
Le lendemain, une petite promenade matinale sur la plage me révèle un cimetière
d'étoiles de mer. En fait je n'avais jamais vu ces animaux vivants. La mer qui
se retire les laisse sur la plage. Certaines sont énormes et chaque branche
ressemble au corps d'un serpent. De nombreux petits filaments sur la partie
inférieure des branches permettent le mouvement, certainement très efficace
dans l'eau, mais, sur le sable...
Je
les vois qui tentent de se mouvoir pour rejoindre l'eau, mais même si l'eau
les rattrape, c'est pour les amener plus loin encore sur la plage. L'effort
qu'elles ont fait est matérialisé par une empreinte dans le sable à 2 ou 3 cm
maximum. Sur la photo, la petite est la taille que nous connaissons chez nous
(10 cm environ). Hors de l'eau elles sèchent très vite. En moins d'une heure,
elles ont perdu leur eau et leur volume.
La tête rentrée dans les
épaules et les mains dans les poches...
Comme toujours, les oiseaux courent sur
le sable et jouent avec les vagues, picorant au passage quelque nourriture,
tandis que les pélicans arrivent en vol groupés et plongent comme des flèches
dans les vagues. Les vagues, énormes, se retournent dans des dégradés de vert
qui s'explosent dans la blancheur de l'écume.
Pisco
est une ville bien étrange. Pleine de vie, elle n'est pourtant pas encore sortie
des ruines. Le tremblement de terre qui a détruit la ville en 2007 est encore
partout présent. En 3 minutes, le séisme a fait 800 morts, dont 180 qui écoutaient
la messe dans la grande église. Celle-ci, toujours fermée, montre un clocher
encore bien fragile...
Dans
la rue, les bulldozers travaillent, les gravats s'accumulent dans les cours
des maisons aux murs vides, les maisons coloniales sont éventrées... Quelques
bâtiments sont déjà reconstruits, les banques surtout et quelques hôtels. On
travaille partout, mais la reconstruction sera longue sans doute...
Le
marché aux coquillages et crustacés du petit port de San Andrés nous permet
de nous ravitailler. Les coquilles Saint-Jacques au prix de ..., combien?? …
40 soles (10€) les...8 douzaines ! Pour les plus grosses bien sûr ! Deux douzaines
suffiront à satisfaire nos besoins immédiats, et à la sortie, nous nous arrêtons
aux crabes ; trois de taille moyenne pour 1 sol (moins de 30 cents)...
Nous
allons à la presqu'île de Paracas, un parc national où il n'y a que du désert,
un magnifique désert où le sable se décline dans des dégradés du jaune ocre
au violet en passant par le rose et le blanc. Un magnifique désert où il n'y
a pas de poulets...
Du mirador de la "Cathédrale",
nous découvrons cette arche de rocher semblable à la falaise d'Etretat à l'origine
et détruite à moitié par le tremblement de terre.
Nous ne nous lassons pas d'admirer les
groupes de dauphins effectuant leurs gracieux ballets, juste en contrebas.
Un
peu plus loin, des lions de mer font la sieste sur les rochers ; les adultes
du moins car les plus jeunes sont très actifs, se battent et se poursuivent
sur les rochers. La poursuite est d'ailleurs amusante vu qu'ils n'ont pas de
pattes et qu'avec leurs nageoires cela ressemble à des courses au sac ! Leur
adresse pour sortir des vagues violentes et grimper le rocher quasi vertical
est sidérante.
Et des oiseaux, toujours des oiseaux.
Klaus, qui a pris le relai de mon angine d'Huaraz, est bien fatigué et ne
profite pas trop du spectacle.
A côté de nous vient se garer un « petit
frère ». Deux jeunes argentins, Augustin et Paola, avec qui nous passons une
délicieuse journée. Un entrainement bien efficace pour parler l'espagnol !
Quand nous nous quittons, on aurait pu croire que l'on se connaissait depuis
de longues années.
Ils partent vers le nord,
le Canada ; nous ne nous verrons plus...
En guise d'adieu...
Sur les îles ballestas, les oiseaux sont en foule nombreuse, toutes sortes
d'oiseaux et en particulier le cormoran, source, si on peut dire, de ce fameux
guano, une richesse pour le Pérou. Tous les petits points noirs sur la colline
sont des cormorans.
Les
lions de mer sont là aussi. Pendant le trajet en bateau nous voyons de temps
en temps leur délicieuse frimousse apparaître hors de l'eau, et vite plonger
quand arrive un bateau. Ils dorment la journée et chassent la nuit. Ce sont
essentiellement des femelles et leurs petits. Les mâles dorment à part sur une
plage où ils ne retrouvent les femelles que pour l'accouplement (« Ne faites
pas de bruit les enfants, papa dort... »)
Ils occupent des rochers
battus par les vagues et glissent parfois dans l'eau pour un petit bain rafraîchissant.
Les
pingouins de Humbolt nous accueillent. Ils ne mesurent que 66 cm et sont ici
en une petite colonie peu nombreuse.
Le
décor des îles Ballestas, tout en falaises, rochers et petits passages, est
un délice pour les yeux. Les bateaux glissent sur l'eau et chaque courbe apporte
de nouvelles découvertes. La promenade est assez courte, un peu plus d'une heure,
mais nous revenons la tête pleine d'images.
Je
prends le bateau seule pour aller aux îles Ballestas, les « Galapagos du pauvre ».
Cette île, où on ne débarque pas, est une fantastique réserve de guano dont
l'exploitation est très contrôlée.
Et je m'exclame avec le
capitaine Haddock :
« Ah ! Ce Pisco, ce Pisco
! Quel bonheur ! » .
Je parle bien sûr de la
région,
lui de la boisson nationale...
Le bateau passe devant le "Candélabre".
Cette figure gravée dans le sable sur une profondeur de 66 cm est une
énigme. On ne sait pas de quand elle date ; certains parlent des Incas,
d'autres de début 1800 où elle aurait servie de repères
aux navigateurs vers le Cap Horn. D'autres pensent qu'elle est beaucoup plus
ancienne. Le fait est que lorsque l'on tire un trait sur une carte entre Tiwanaku,
ancienne culture du Lac Titicaca, et le Candélabre, on passe par Nasca,
autre énigme... Ce n'est sûrement pas un hasard !
Ils
attendent leur libération qui les verra entassés vivants dans des caisses, chargées
les unes au-dessus des autres dans d'autres grands camions. Je les ai retrouvés
un matin tôt en ville. Ils arrivaient déplumés et prêts à être consommés, en
vrac dans un camion-benne, et étaient répartis dans les marchés et les différents
magasins de la ville, qui, l'un à côté de l'autre proposaient les mêmes pollos
(poulets). Et il y a des habitations à côté de ces centres de production battus
par les vents, et on se demande qui, de l'homme ou du poulet, est le plus à
plaindre...