Pérou

De Nazca à l'Equateur. 18 mai 2010.

En route vers le Pacifique, nous traversons de splendides régions de montagnes aux versants abrupts. Quand le relief est plus doux, tout est recouvert de plantations dans un magnifique dégradé de verts, avec en toile de fond les glaciers de la Sierra Real.

Nous n'avançons pas très vite car les arrêts photo se multiplient. Nous passons un col à 4OOOm, redescendons à 1800 pour remonter encore à 4000m et redescendre encore à 18OO, tout cela en une petite journée.
Des rivières roulent des flots tumultueux d'une eau claire et bleue. L'eau suinte de partout, imbibant toute cette verdure. De nombreuses fleurs colorent les pâturages.
Puis vient un plateau à 4000m, long de plusieurs centaines de km, avec de nombreux cols entre 4200 et 4500m. Des villages se nichent sur ces étendues exposées aux vents, là où logent les bergers des immenses troupeaux de lamas et alpagas. Les vigognes, nombreuses, sont là aussi et il y a beaucoup de petits dans tous les troupeaux.
Des enfants courent pour quémander un petit quelque chose. Ils repartiront avec quelques victuailles, un peu surpris devant ces gringos qu'ils ne comprennent pas très bien ...
.... mais ils vont se mettre à rire quand je leur donne un cahier sur lequel je les gribouille en trois coups de crayon l'un après l'autre.
Et nous franchissons le dernier col, à 4300 m, et soudain tout change... Une immense dune apparaît, le Cerro Blanco, la dune la plus haute du monde, et un paysage totalement désertique succède aux verdoyantes montagnes.
De ce côté de la montagne il n'y a plus que sable, pierres et boue durcie. Plus le moindre cours d'eau, tout est totalement sec. Une brume enveloppe ce paysage désolé, accentuée par la lumière du soir. Une quarantaine de km nous séparent de Nasca, à 600 m d'altitude ; commence alors une longue descente de 3700 m sur une route aux lacets serrés et nous arrivons à Nasca à la tombée de la nuit.
Nous retournons au mirador des Lignes de Nasca, mais, pas plus que la première fois, je ne pourrai dépasser la moitié de la montée à cause du vertige. Qu'importe, vues de là les Lignes se voient déjà très bien.
Nous arrivons à Ica, une assez grande ville très étrange puisque bâtie entre les dunes. Tout autour de la ville, c'est le désert et les grandes dunes. A Ica, se trouve un musée qui recèle de délicieuses poteries, d'une grande finesse et de jolis motifs. Dire que certaines ont près de 2000 ans et sont parfaitement conservées !
Les momies sont là aussi ! Dans ces climats extrêment secs (comme en Egypte), elles sont très bien conservées et présentent encore une partie de leurs téguments.
Pisco et le Parc National de Paracas nous avaient laissé un bon souvenir. Nous y revoyons ce magnifique désert, et ses habitants maritimes, les lobos marinos, les lions de mer.
Ici, ce sont les Lobos Finos et non plus les Otaries de la Patagonie atlantique ; et c'est vrai qu'ils sont beaucoup plus fins ! Les oiseaux sont là aussi, très nombreux, pélicans, gaviotes et aussi cet étrange oiseau à la tête rouge qui souhaite la bienvenue aux visiteurs du parc.
Il est toujours plaisant de revenir à des endroits connus. On ne perd pas de temps à chercher un emplacement pour la nuit, un point d'eau pour faire le plein, on sait où trouver quoi, on retrouve les boutiques, les restaurants, les animaux. C'est un peu à chaque fois un retour à la maison...
Nous retrouvons le Pacifique, cette côte désertique avec peu de cocotiers et beaucoup de dunes et de poulets. Quelle différence entre le Brésil gorgé d'eau, riche en cultures de toutes sortes, où abondent fruits et céréales et cette côte pacifique où seules les embouchures des rivières sont des oasis de verdure et où bien vite, les dernières gouttes d'eau absorbées, le désert réapparait. Le désert occupe presque toute la côte pacifique, de l'Equateur au Chili, sous un ciel gris la plupart de l'année. Le désert n'est en fait qu'une bande assez étroite et sitôt passée la chaîne côtière des Andes, les pays deviennent ensoleillés et plus verts.
Les Andes sont formées de deux chaînes parallèles nord-sud, la chaîne côtière qui n'excède pas 1000m au sud du continent, et où elle peut dépasser les 4000 m, comme au Pérou, puis la haute chaîne dont les sommets peuvent atteindre plus de 6000 m. Entre ces deux chaînes , les cultures abondent, souvent en terrasses là où les pentes sont fortes. Au nord du Chili, le désert de l'Atacama s'étend jusqu'à la haute chaîne. En Bolivie, les deux chaînes dépassent les 6000m et entre les deux se trouve l'Altiplano, haut plateau à 4000 m.
Il est intéressant de comparer ce désert à celui du Sahara Atlantique, dont une partie est l'ancien Sahara Espagnol, et qui s'étend au sud d'Agadir sur plusieurs milliers de km, jusqu'au Sénégal pratiquement. Il n'y a pas d'eau. Les nouvelles villes marocaines comme Layoune, Tan-Tan ou Dakhla sont alimentées en eau soit par pipline soit par des usines de désalinisation d'eau de mer. Autrefois les français ravitaillaient en eau la ville de Nouadhibou par cargo depuis le Sénégal. A noter que c'est au Banc d'Arguin, sur la côte atlantique mauritanienne, que le navire La Méduse s'était échoué. Vraiment pas de chance...
Cette description ne se veut pas scientifique, elle n'est que le reflet de ce que nous avons observé et ressenti au cours de notre voyage. Elle est aussi très sommaire car il y a en fait beaucoup de variations en fonction des lieux. Ce qui frappe au Pérou, c'est que ce désert de sable, de pierres et de dunes doit contenir énormément d'eau en son sous-sol. Beaucoup de cultures sont pratiquées autour des villages et des villes, au milieu du désert.
Vers le nord du Pérou, autour des villes, dans le désert, on trouve des champs de coton (à droite) et des rizières très étendues. Or ces deux cultures nécessitent beaucoup d'eau. Les arbres fruitiers abondent et pommes, mangues, ananas et beaucoup d'autres fruits inondent les marchés de ces villes à des prix très bas. Un exemple : j'achète trois énormes mangues, deux avocats et un grand ananas, le tout pour moins de 2 €. Et bien sûr, tout cela est délicieux !
Nous remontons ainsi la côte péruvienne, traversons Lima dans une circulation plus calme que la fois précédente (je n'aurai pas à opter pour la voie du milieu...). Mais à Lima comme dans toute ville en Amérique du sud, les panneaux indicateurs sont très rares et nous aurons bien du mal à retrouver la Panamericana Norte et à sortir de la ville.
La Panamericana, c'est une route qui traverse nord-sud l'Amérique du Sud. Elle est au Pérou une route à deux voies, en général bonne, d'une monotonie impensable dans certaines parties désertiques. Nous l'évitons tant que nous le pouvons. Mais il faut avouer que lorsqu'il faut faire des km, elle est aussi bien pratique ! Beaucoup de voyageurs ne connaissent que cette route et c'est dommage, car les pistes du centre que nous avons prises en juillet et août sont magnifiques.

Pour les cyclistes, ce doit être l'horreur ! Pourtant, la plupart d'entre eux qui traversent les deux Amériques, d'Ushuaia à l'Alaska, un pari incompréhensible pour nous non cyclistes, restent sur cette route et ne voient rien d'autre du pays.

Peu après Lima, nous la quittons pour retraverser les montagnes et rejoindre, par un col à plus de 4000m encore, Huaraz, le cœur de la Cordillère Blanche. Nous la connaissons bien maintenant puisque nous y revenons pour la troisième fois !

Nous déposons notre linge à la laverie habituelle (ça, c'est pour les Bouvier !), retrouvons notre place de parking pour la nuit, et le marché animé où d'autres cuys (cochon-dindes) attendent d'être tués, dépecés et passés à la casserole (ceux du mois d'août ont déjà été mangés !).
Puis nous partons vers les montagnes dans le Parc National de l'Huscaran. Nous n'attendrons pas comme la dernière fois à l'entrée du parc pour partir au petit matin. Nous entrons dans le parc après la fermeture, et montons jusqu'à la Laguna Llaganuco où nous passons la nuit. Nous sommes à 3800m, une altitude correcte pour dormir, et avons gagné une bonne heure de route.
Lorsque le matin à 6 h les rayons du soleil commencent à atteindre notre voisin, l'Huscaran, point culminant du massif, nous prenons la route vers le col de 4800 m. Le spectacle est prodigieux ! L'Huscaran se reflète en miroir dans l'eau immobile de la Laguna, puis tous les sommets environnants s'éclairent l'un après l'autre.
Il y a encore peu de nuages pendant toute la montée où nous nous arrêtons fréquemment pour admirer un paysage différent à chaque virage. Et des virages, il y en a !!! Certains ont même été meurtriers comme en témoignent le groupe de petites croix (8 ici) en bord de route...
Vers 9 h, les nuages arrivant de l'Amazonie recouvrent progressivement les sommets et remplissent les vallées. Le rideau tombe peu à peu sur le spectacle... Quelques flocons finissent de nous convaincre que nous ne verrons plus rien, alors nous redescendons, heureux d'être partis si tôt et le cœur encore plein de ces images magnifiques. Quand nous retrouvons la Laguna, quelques touristes viennent d'arriver et se promènent, admirant quelques glaciers encore visibles, ignorants des sommets de plus de 6000m qui les entourent et dont ils ne verront rien.

Les sommets enneigés ne se reflètent pas seulement dans l'eau calme de la laguna...
Heureux de ce détour à Huaraz, nous repartons une fois de plus vers le Pacifique et repassons par le Canyon de Pato. La piste s'est dégradée depuis le mois d'août et nous mettrons plus de temps que prévu pour faire la centaine de km qui rallient le goudron. Peu avant d'y arriver, nous rencontrons un groupe de 4 cyclistes. Deux canadiens partis de Mexico se rendent au Chili et deux jeunes filles belges, parties du Costa Rica, rejoignent Buenos Aires. Nous ferons une petite halte sympathique en leur compagnie.
Certaines petites mouches, connues et redoutées, en profiteront pour nous ajouter à leur festin, et c'est tout en se grattant que nos cyclistes dégusteront un expresso aussi délicieux qu'inattendu dans cet endroit désertique. Les petites mouches les attaquaient depuis un certain temps déjà et ils étaient recouverts de nombreuses piqures.

Nous étions heureux de pouvoir nous réfugier dans notre fourgon et de les laisser aux dizaines de km de mauvaise piste en montée qu'ils avaient devant eux...

Au moment de les quitter, je dis à Yves :" Je vous admire !", il me répond :"Et moi, je vous envie..." La vie n'est sans doute pas toujours rose à vélo !

( à droite, camion décoré)

A Chiclayo, nous retournons voir le Senor de Sipan dans le magnifique musée qui lui sert d'écrin. Nous comprenons beaucoup mieux l'espagnol maintenant et cette deuxième visite sera un délice ! Nous retournerons aussi voir le Senor de Sican et son étrange mise en scène macabre....
Nous continuons toujours vers le nord, traversons des déserts, des villes entourées de rizières, encore des déserts, puis retrouvons Los Organos, un charmant petit port avec une grande plage.
L'eau est frisquette ! Mais la baignade nous révèle un charmant spectacle : l'eau claire laisse voir de très nombreuses étoiles de mer, rouge orangé, très jolies, qui n'ont rien à voir avec celles que j'avais vu échouées sur une plage près de Lima. Celles-ci sont petites, pleines de vie, dans l'eau ; elles se déplacent assez rapidement ou se fondent dans le sable par le mouvement de leurs cils. Une petite vibration sous le pied...zut, j'ai dû marcher dessus !

Nous sommes surpris de voir que, malgré la position du pape concernant la régularisation des naissances, le très catholique Pérou applique le familily Planing :

"Vous pouvez décider du nombre d'enfants que vous voulez avoir."

(j'ai traduit mas o menos, Jacques...)

Nous quittons le Pérou, ce pays que nous avons tant aimé...

Le Pérou avec ses sites archéologiques exceptionnels, si riches, si variés, dont les incas ne représentent qu'une infime partie...

Le Pérou et ses habitants, souriants et accueillants...

La verticalité des montagnes et la qualité spéciale de la neige donnent ces rainures verticales, typiques des montagnes andines. On le voit bien ci-dessous sur... l'Huandoy dont les deux sommets culminent à 6395 et 6356 m (c'est pour toi Nico !). Il fait face à l'Huscaran (à gauche) qui atteint 6655 et 6768 m. La laguna Llaganuco où nous avons dormi se trouve entre ces deux géants .

Le Pérou avec ses paysages fantastiques, mer, déserts, forêts et montagnes...

Le Pérou qui nous a fait rire ou ému...

Nous quittons le Pérou, le coeur débordant d'images magnifiques qui, déjà ! appartiennent au monde des souvenirs...
Le Pérou, ce n'est pas que le Machu Pichu !!!
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