Argentine
Chaque
année, les baleines franches australes viennent pour la naissance de leur baleineau
à la péninsule de Valdès pour se reproduire. Elles partent pour l’Antarctique
au plus tard à la mi-décembre.
Après
une semaine passée sur la plage, nous partons plein sud vers Ushuaïa. Nous ne
sommes pas allés en Terre de Feu lors de notre précédent voyage. Nous aimerions
voir comment les habitants vivent là-bas dans des conditions climatiques si
difficiles.
En
2011, nous étions arrivés début janvier et il n'y avait plus de baleine. Pour
ce voyage, le rendez-vous était pris : nous serons en novembre à Valdès. Tout
le reste du voyage va s'articuler autour de cette date. Nous arrivons fin octobre.
D'une plage, avant l'entrée dans le parc, on peut très bien voir les baleines
qui viennent se prélasser à quelques dizaines de mètres du bord. Comme beaucoup
d'autres français déjà présents, nous nous installons pour quelques jours de
spectacle.
Celui-ci ne va pas tarder car le soir même
nous en verrons quelques unes. Nous n'avons pas compris pourquoi elles venaient
sur cette plage précisément et ce qu'elles y font quand elles restent parfois
plusieurs heures, accompagnées de leur baleineau. Une tête sort de l'eau, puis
apparaît une deuxième tête plus petite. Parfois les baleines nagent en sortant
le corps à demi, en parallèle avec leur petit.
Si
les photos n'ont rien de passionnant, je le conçois, le spectacle est magnifique
quand on le contemple en direct. La baignade est interdite sur la plage lorsque
les baleines sont là. Hypocritement, nous avons fait semblant de le regretter
(l'eau ne devait pas être bien chaude...). Le troisième jour, toutes les baleines
vont émettre des sons puissants (le chant des baleines sans doute, même si celui
qui a appelé cela chant ne devait pas être très mélomane...). Plus au large,
là où il y a de grandes profondeurs, les baleines effectuent des sauts. Nous
les regardons à la jumelle.
Le troisième jour, Jérôme et Valérie, accompagné de leur fils Charles, 5ans
et demi, arrivent en fourgon. Tout de suite ils voient des baleines. Ils nous
quittent pour voir si du côté des autres français il y a des enfants. Ils ne
seront pas déçus ! Ce sont treize garnements qui courent là-bas, tous français !
Charles disparaît aussitôt dans la tribu et il ne fera que de rares apparitions
le lendemain.
Les
voyageurs ont toutes sortes de véhicules, depuis le fourgon comme le nôtre jusqu'au
super gros camion, en passant par les camping-cars petits ou très grands et
les 4X4 avec cellule. Ce qui est amusant, c'est qu'à la fin, tout le monde va
faire le même trajet, à peu de choses près, en Amérique du sud !
Une
jeune et gentille garde du parc nous fait une petite introduction où il sera
question de « michonès » de anos, de « baché » ou encore de « faché ».
Ah ! L'accent argentin ! Ce n'est pas pour rien qu'un certain Ernesto avait
été baptisé « Le Che » ! Car bien sûr, il fallait comprendre des millions d'années,
la vallée ou encore la faille. Je suis sûre que vous n'aviez pas deviné !
Il fait moins chaud que la dernière fois et nous nous promenons avec délice
dans ce décor grandiose. Les arbres, des araucarias, sont immenses, l'écorce
semble encore vivante.
Des
éruptions volcaniques successives dans la Cordillère des Andes, à des centaines
de km de là , ont totalement recouvert de cendres d'immenses et magnifiques
forêts, ne laissant qu'un désert total. C'était il y a 150 millions d'années.
Nous
ne pouvons malheureusement pas dormir sur place car si un parc national implique
certaines restrictions, le monument naturel est encore plus restrictif. Nous
serons donc obligés de trouver un lieu pour la nuit en dehors du parc. Au milieu
de nulle part, dans une immensité de végétation rare et ténue, nous nous retrouvons
un peu en Mongolie... Une incroyable impression de liberté se dégage de tels
endroits.
Klaus tente une réparation
au cyanolit de notre pare-brise fracturé.
Le
lendemain, nous faisons quelques petites rencontres sur cette piste peu fréquentée.
Beaucoup de guanacos tout d'abord ; puis de grands troupeaux de chevaux en liberté ;
A côté de la piste, un mara court tranquillement.
A 40km/h seulement. Il court à côté de nous et suit notre vitesse. Klaus accélère
un peu, notre mara fait de même. Finalement Klaus est à 60km/h (il ne peut
pas aller plus vite sur cette piste) et notre mara tient la vitesse. Il va
ainsi courir à côté de nous à 60km/h pendant près de 2
km avant de partir sur le côté tout en continuant aussi vite.
Ouf ! Klaus peut ralentir...
et
aussi des maras. En voici toute une famille ! Assis, ils ressemblent à de grands
lapins, mais debout ils sont complètement différents. Leurs pattes arrière sont
aussi fines que les pattes avant, assez longues aussi. En fait le mara est le
champion de la course comme nous allons le voir peu après.
Une
reconstitution grandeur nature du bateau de Magellan nous permet d’apprécier
sa forme et sa taille, très petite pour les 45 hommes qui étaient à bord . Ces
marins étaient bien courageux pour se lancer à bord de tels bateaux sur les
grands océans inconnus. L'histoire nous dit que Magellan est parti avec 5 navires.
Au bout de trois ans, un seul navire reviendra à Séville après avoir fait le
tour du monde, mais Magellan ne sera plus à bord. Il se sera fait assassiné
en chemin, aux Philippines, par des indigènes.
Ceci
n'est pas une maquette, mais bien un vrai bateau, dans lequel on peut monter.
Il n'a simplement jamais été en mer.
Pour
nous Puerto San julian sera une halte bien reposante. Dans un camping quasiment
désert, mais ayant internet, nous fêterons mon anniversaire avec une délicieuse
marmite de fruits de mer ! Nous ferons d'ailleurs une cure de crevettes gigantesques,
de poissons et de fruits de mer car cette ville est la première d'Argentine
où nous ayons trouvé un vrai poissonnier et, de plus, à des prix très savoureux.
Notre
halte suivante est Monte Leon, le parc des pingouins (voir article précédent).
Mais il n'y a pas que des manchots à Monte Leon ; quelques lions de mer se prélassent
au soleil. Les mâles, trop lourds, ne peuvent pas monter à marée
basse. Les dames, seules en haut, papotent entre elles...
L'île
des Cormorans est bien peuplée et pas seulement de cormorans, les gaviotes sont
là aussi et bien d'autres espèces d'oiseaux qui vivent chacun de leur côté (à
chacun son quartier). Un vieux téléphérique, témoin d'une époque révolue, permettait
aux ramasseurs de guano de rejoindre l'île. La découverte des nitrates
utilisés comme engrais a ruiné les artisans du guano. (« Le
guano, qu'est-ce que c'est ? » Voir la réponse du capitaine Haddock dans Tintin,
le Temple du soleil).
Et
Monte Leon, c'est aussi un paysage magnifique, des plages de rêve (mais seulement
de rêve car avec le vent et la température, on ne se risque pas aux bains de
soleil ni à faire trempette).
Nous
arrivons dans une période où la marée basse est particulièrement basse, ce qui
fait que l'île aux Cormorans n'est plus entourée d'eau et que l'on peut à pied
découvrir ce coin de plage.
Les falaises sont creusées de grottes
dont la paroi est striée de bandes colorées.
Mais le vent ! Le vent !!!!!!!!!!!!!!
Nous remettons en question
notre voyage en Terre de Feu...
Les
guanacos sont de plus en plus nombreux. Ils sautent les clôtures avec élégance.
Parfois, on en voit un qui n'a dû sauter assez haut. Son squelette est encore
entouré de la peau, accroché dans la clôture.
Nous
continuons notre route vers le sud à travers des paysages d'une monotonie navrante.
Les centaines de km succèdent aux centaines de km. C'est qu'ici, les distances
sont grandes et bien peu de choses arrivent à distraire le regard.
Car
en Patagonie, comme partout en Argentine, au Paraguay et au Chili, il y a des
clôtures de chaque côté de la route, des milliers de km de clôture. C'est ça
qui fait la différence avec la Mongolie où la clôture n'existe pas. Bien sûr,
ici aussi les animaux ont de quoi se dégourdir les pattes puisque les estancias
s'étendent sur des dizaines, voir plus d'une centaine de km. Mais il y a quand
même une clôture.
Au
bord des routes, on trouve souvent ces étranges autels, tout rouges. Des drapeaux
volent au vent, des fleurs artificielles aux couleurs criardes l'entourent.
C'est l'autel dédié à Gauchito Antonio Gil, un genre de Robin des Bois gaucho.
D'autres
autels du même genre sont dédiés à la Difunte Correa. C'est l'histoire d'une
femme qui est allée retrouver son mari parti à la guerre. Dans le désert, on
l'a retrouvée morte de soif, allaitant son bébé encore en vie. Pour elle, on
dépose des tas de bouteilles en plastique pleines d'eau ou vides.
Ces
deux personnes ont été sanctifiées par le peuple. De temps en temps, l'église
vient faire une petite bénédiction (histoire de ne pas perdre sa clientèle).
On retrouve ici cet étrange mélange de christianisme et de superstition, comme
on l'avait déjà vu en Afrique Noire.
Rio
Gallegos (les argentins disent « Rio Rrracherrros »), est la ville de l'ex-président
Nestor Kirchner, dont la tendre épouse Cristina vient de terminer son deuxième
mandat présidentiel(après deux mandats de Nestor qui, alors qu'il se
représentait pour son 3ème mandat en 2011, est subitement décédé avant les élections.
Cela faisait drôle de voir les affiches « Votez Nestor Kirchner » alors qu'il
était mort et enterré. C'est alors que Cristina s'est dévouée
et s'est fait réélire à la place de son mari). Le 22 novembre 2015, Macri a
été élu, mettant fin à la dynastie Kirchner qui aura quand même régné en Argentine
pendant plus de 15 ans).
Nous
quittons la route goudronnée pour 50 km de piste qui nous mènent d'abord dans
le Parc National puis dans le Monument Naturel National des Bosques Petrificados,
les bois pétrifiés. Nous y sommes déjà allés en 2010, et séduits, nous voulons
les revoir.
Tiens, un étrange lac, tout rouge. Il rappelle la Laguna Colorada en Bolivie.
Là-bas, ce sont de petits crustacés qui la colorent en remontant à la surface
au fur et à mesure que la température augmente (nous sommes là-bas à plus de
4000 mètres d'altitude là où les nuits sont fraîches et les journées
chaudes). Mais ici ?
Un vent terrible nous a poussé dans un restaurant avec wifi. Tant mieux, on
va pouvoir appeler Antoine et savoir si le bébé est né. Le temps de manger mon
steak, coupure de courant dans toute la ville donc plus de wifi et plus de nouvelles
d'Antoine.
Alors en route plein
est vers la Cordillère des Andes, et tant pis pour Ushuaïa!
Donc
Rio Gallegos est la ville de Nestor Kirchner. Durant sa présidence, il a développé
la Patagonie et mieux payé les policiers (du coup on ne les voit plus sur la
route que pour nous faire de grands bonjours amicaux et on ne s'en plaint pas).
La municipalité a sans doute bénéficié aussi de bons crédits : avant
la ville, dans un endroit encore totalement désertique et sur plus de 20 km,
voici une route deux fois deux voies, bordée de lampadaires tous les trente
mètres. Ne faites pas le calcul, on l'a fait pour vous, 1500 lampadaires !
On
sort du restau et cela souffle !!! Vraiment, nous n'irons pas plus au sud; on
n'en peut plus de ce vent....
Puerto
San Julian est un petit port. Son intérêt principal tient au fait que Magellan
a débarqué en ce lieu. C'est ici que la première messe a été célébrée en Argentine.
Même en priant, on peut être hypocrite...car pendant cette messe certains membres
d'équipage tentèrent de tuer Magellan. Les coupables seront punis de mort ce
qui fait dire aux historiens de la ville que l'arrivée des espagnols (considérés
ici comme des bienfaiteurs) s'est fait dans un bain de sang. Ce n'est certainement
pas un cas unique, mais en général c'était plutôt du sang indigène...