Chili
Chiloé et retour au sud du Chili.
13 décembre 2010.
Il est dans la vie des périodes de vide,
des moments où on a l'impression de ne pas avancer, où on voudrait faire un
grand saut pour sortir de l'enlisement. Cette semaine fut l'une de ces périodes,
un temps mort dans le voyage, plein de contrariétés, de ces temps qui permettent
d'apprécier ces autres moments, les plus fréquents, où tout marche selon nos
souhaits...
Un
7 décembre, nous embarquons vers l'île de Chiloé après avoir beaucoup hésité
à cause de la pluie. Mais le soleil revient dés l'embarquement. La traversée
est courte, une bonne demi-heure. Nous retrouvons les pélicans ; ils volent
au ras de l'eau et un groupe de cinq ou six arrive directement vers le bateau,
sur le côté ; ils s'approchent de plus en plus sans rien modifier de leur trajectoire,
puis s'élèvent lourdement pour passer au-dessus du bateau, nous accompagnent
une ou deux minutes puis reprenent leur route au-dessus de l'eau.


Le
guide du routard indique que « en prenant à gauche à la sortie de l'embarcadère,
on arrive à une petite plage où se trouvent des loups de mer ». Nous prenons
donc à gauche, en touristes obéissants, et arrivons à la petite plage où bien
sûr il n'y a pas de loups de mer. Nous sommes près d'un phare dont le gardien
arrête ses activités pour nous regarder. Il a l'air de se demander pourquoi
les touristes arrivent justement ici, et pourquoi surtout des touristes français...
Nous
rejoignons ensuite Caulin et sa plage où nous passons la nuit. Le ciel est encore
bleu, et les ramasseurs d'algues s'activent jusqu'à la nuit et même au-delà
pour collecter leur précieux butin, le retourner pour bien le sécher puis le
mettre en sac. Les sacs sont ensuite ramassés par un véhicule qui fait la tournée.
Plus au nord du Chili, nous avions déjà
vu ces ramasseurs d'algues et même au Pérou. Selon l'endroit, les variétés
d'algues sont différentes. A Chiloé, la plupart des algues sont destinées
au Japon et se retrouveront un jour dans les restaurants en sushi...
Nous découvrons les cygnes au
cou noir qui vivent sur les bords de mer dans le sud du Chili et à
Chiloé.
Le
lendemain, il pleut... Nous reprenons notre route vers Ancud, deuxième ville
du pays. Pratiquement tout est fermé bien que nous soyons en pleine semaine.
Nous apprenons que le 8 décembre, c'est la fête de l'Immaculée Conception, donc
jour férié. Nous découvrons cependant un magasin de pescados y mariscos (poissons
et fruits de mer) ouvert. Nous y faisons une réserve de moules grandes comme
la main (sic !), saumon fumé et chair d'araignée de mer. De quoi tenir quelques
jours !
A
proximité se trouve une plage qui abrite une colonie de manchots de magellan.
Une accalmie nous permet de les approcher au sec et de les observer à la jumelle,
jolis dans leur smoking blanc et noir. Très actifs, ils sont nombreux à arriver
de la mer et sortir de l'eau pour rejoindre les talus de terre ; d'autres roulent
et retombent vers la mer. Le spectacle est très amusant. Progressivement, ils
se couchent, et tout le monde dort... Ils sont malheureusement trop loin pour
être photographiés.
Retour
pour la nuit à Ancud sous la pluie, toujours la pluie. Et le lendemain, nous
partons vers la capitale, Castro, une jolie petite ville. Castro n'est pas à
proprement parlé sur la mer mais à l'intérieur d'une longue lagune. Les marées
y sont quand même bien présentes.
De
part et d'autre de la ville se trouvent des groupes de maisons sur pilotis.
Ces maisons sont en bois, très colorées comme toujours au sud du Chili et souvent
assez anciennes. A Castro, on trouve des maisons en bois neuves, des maisons
fraîchement repeintes, des maisons plus défraîchies, et enfin d'autres carrément
très vieilles.
Castro n'est pas une de ces villes pimpantes et bien entretenues dans un but
touristique. C'est une ville plus authentique où la peinture écaillée est dominante,
ce qui donne à la ville un charme particulier. Le tour de la ville, vite fait,
sera d'autant plus rapide que la pluie ne cessera jamais longtemps. A un moment,
elle prenait même des allures de neige... Ce n'est pas pour rien que les locaux
disent qu'à Chiloé, on peut trouver en une journée les 4 saisons
!
Nous
ne comprenons pas que dans un pays où il pleut tellement, où l'humidité est
omniprésente, qu'en plus on habite des maisons sur pilotis avec les pieds dans
l'eau...
Notre
décision est déjà prise de quitter Chiloé au plus vite. Nous voulons nous réfugier
au soleil, mais où ? La Patagonie n'est pas réputée pour ses plages ensoleillées...
Nous visitons encore quelques villages et nous dirigeons vers l'embarcadère
au nord.
Un
bruit violent me réveille en sursaut (et oui, il m'arrive de somnoler sur la
route). Klaus s'arrête aussi vite que possible. Un pneu a éclaté dont les vestiges
sont déjà ici et là sur la route. Irréparable... (vous en doutiez ?)
Klaus
peste contre la pluie qui reprend déjà ! Nous sommes vendredi et il sera urgent
de trouver un garage pour changer deux des pneus qui nous ont déjà accompagnés
en Mongolie et même, pour l'un d'eux, en Mauritanie. Ils ont fait leur travail
…
Le
soir, à Puerto Montt, nous trouvons un super parking avec vue sur la ville.
Accessoirement rendez-vous des amoureux. Alors que nous sommes tranquillement
assis à l'arrière, lumière allumée, un bruit puissant et étrange nous fait sursauter.
La vitre avant, côté passager, vient d'exploser. Je sors immédiatement, personne
dehors, sauf les amoureux s'ébattant dans les voitures. Nous faisons une réparation
de fortune avec un sac plastique, nous demandant quel phénomène a pu provoquer
ce dégât. Nous quittons notre parking pour un lieu surveillé dans une station-service,
car à présent, la voiture est ouverte à tous... Ce n'est que le lendemain que
je me rends compte que mon anorak a disparu...


Nous
sommes samedi et par chance (?) dans une grande ville. Le garage Mercédès nous
commande, samedi à 11h, la vitre qui arrivera de Santiago (1000km environ)
le lundi matin. Bravo pour le service rapide ! Nous passerons la fin de l'après-midi
au bord du lac Llanquillé, quitté moins d'une semaine auparavant, et apprécions
le soleil qui nous permet de profiter enfin du magnifique Volcan Osorno que
nous pensons voir une dernière fois...
Pour
attendre le lundi, nous trouvons un camping très tranquille d'où nous avons
une vue superbe sur un autre volcan, vue tout à fait inutile d'ailleurs puisque
nous passerons toute la journée du dimanche sans sortir du fourgon pour cause
pluie incessante. Ce qui n'empêchera pas les chiliens de débarquer au camping
pour une journée parrilla....(barbecue)
Le lundi, notre vitre retrouvée, nos roues chaussées à neuf, nous quittons avec
joie Puerto Montt pour la Patagonie !!! et commençons à descendre le long d'une
côte couverte de forêts. En fin d'après-midi, nous prenons notre premier
ferry pour traverser un fjord. Les pélicans descendent eux aussi vers le sud
et nous voyons de nombreux groupes longer la côte. Admirer ces oiseaux qui nous
sont devenus familiers, dans le teuf-teuf du moteur d'un ferry pas très rapide,
est une agréable pause...
Sitôt
débarqués, nous continuons notre route vers Hornopiren d'où part le ferry suivant
pour un long trajet vers Chaiten car il n'y a plus de route. Il est déjà tard
quand nous arrivons à cette petite ville dont l'activité essentielle tourne
autour de l'élevage du saumon, comme beaucoup d'autres villes de la région.
Pas d'affichage d'horaires des ferries, rien. Des pêcheurs me disent que le
ferry part le lendemain à 8h.
Nous
sommes à l'embarcadère dés 7h30 et attendons notre ferry. Toujours pas là à
9h, je redemande à d'autres pêcheurs qui nous conseillent d'aller à l'Office
du Tourisme. Là, on nous annonce que le prochain ferry est dimanche alors
que nous sommes mardi... Heureusement que nous n'avons pas continué d'attendre
à l'embarcadère, nous aurions été couvert de mousse à l'arrivée du ferry...
L'attente
est trop longue, nous décidons de faire demi-tour et de rejoindre l'Argentine
pour arriver en Patagonie. Nous ne reprenons pas le ferry mais longeons sur
plus de 100km le fjord que nous avions traversé.
La piste est très jolie, le soleil est
revenu, malgré les nuages.
Les nombreux élevages de saumon font
un peu tache dans ce paysage si sauvage...
Nous
évitons Puerto Montt et rejoignons, pour la troisième fois, le Volcan
Osorno, brillant sous le soleil, magnifique ! Nous passons la nuit à la station
de ski de l'Osorno, à 1200 m, ce que nous n'avions pu faire deux semaines auparavant
à cause de la pluie. Le sol est couvert de cendres ; pourtant la dernière
éruption date de 1835. Mais il faut se méfier du volcan qui dort
; au sommet, sous la calotte de glace, les rochers sont chauds...
Nuit
très calme à la sation désertée pour la nuit et réveil dans le soleil au-dessus
d'une mer de nuages, ces nuages que nous avions toujours au-dessus de nous.
Les sommets enneigés émergent au-dessus de ce tapis blanc qui s'étend à l'infini,
ravivant le souvenir d'une mer de dunes s'étendant sur plus de 1000 km en Mauritanie...
Toujours sous le soleil, nous reprenons
la route que nous avions déjà parcourue deux semaines auparavant
et rejoignons la frontière argentine avec un grand soulagement de quitter
le Chili...
A gauche, rhubarbe géante.
Outre
les mauvais souvenirs des derniers jours, la pluie et le froid, nous avons trouvé
au Chili un pays assez rigide, à l'image de ces routes bordées de rigoles
bétonnées, interdisant tout arrêt pour admirer les paysages ou changer de conducteur
; un pays aussi où tout est payant que ce soit les sites naturels ou les parkings
en ville ; on ne peut pas s'arrêter en ville pour regarder une carte, réfléchir
sur un itinéraire, qu'aussitôt surgit un garde pour payer ; insupportable après
quelque temps.
Un touriste me disait : « Même pour pisser,
il faut payer ! ». Et puis, le
Chili est le pays le plus proche de l'Europe quant au mode de vie et ils n'ont
pas pris de nous le meilleur ! Mais les normes qui nous ont envahis les dernières
années sont présentes partout ; ces lois aussi qui rendent les conducteurs
égoïstes et hargneux : « Passe pas, j'ai la priorité ! ».
Sitôt passé la frontière argentine, sous
un soleil radieux, l'Argentine avec ses routes aux larges bas-côtés où
l'on peut s'arrêter, ses nombreux parkings sur les points de vue, l'Argentine
avec.... ses toilettes gratuites, nous avons eu l'impression de revivre. Le
sourire est revenu, le moral est au beau fixe.
En voyage, comme dans la vie, ce sont
les mauvaises périodes qui nous font apprécier les moments où tout va bien
!
Nous
sommes loin de ces pays "où l'on conduit mal (!)"(Bolivie,
Ukraine,...) et où les véhicules venant en face n'hésitent
pas à rouler sur le bas-côté pour que nous puissions emprunter
la voie de gauche si des obstacles sont sur la nôtre ; là où
les conducteurs se préoccupent aussi des difficultés des autres,
là où vraiment conduire est un partage.
Bien sympathiques aussi ces policiers
plongés dans l'embarras par nos questions ; en Bolivie : qui a la priorité
? " Pas de priorité, on regarde comment on peut passer. Mais c'est
celui qui choque qui est responsable !"
en Mauritanie : quelle est la limitation
de vitesse ? "On n'a pas ça chez nous. Quand la piste est mauvaise,
on roule doucement ; quand elle est bonne, on roule plus vite. "