Colombie

La Côte Caraïbe. 9 juillet 2011.

Nous arrivons à Cartagena par le sud-ouest. Les faubourgs de la ville sont des quartiers très pauvres. Partout, il reste des traces de la dernière pluie, cours inondées, boue et beaucoup de poubelles. Nous espérons profiter de la côte paradisiaque de la Mer des Caraïbes pour terminer notre voyage en apothéose ! Mais... le paradis existe-t-il ?

Nous partons, toujours sous un ciel très gris et avec des averses intermittentes, vers Santa Marta en direction de la frontière du Vénézuela. Barranquilla, un grand port, une grande ville de 1,5 millions d'habitants, est très exotique avec ses marchés dans les rues et beaucoup d'animation. Une ville qui ressemble plus à l'Afrique ou à l'Asie qu'à l'Amérique du sud. Un grand pont passe au-dessus de l'immense fleuve qu'est devenu le Rio Magdalena dans lequel s'est déjà jeté le Rio Cauca.

L'hôtel Bellavista est connu de tous les voyageurs. L'hôtel ressemble à une ville miniature avec des rues bordées de maisons, qui sont en fait les chambres, des petites cours et le parking pour les véhicules, encombré de grabats (sans doute des travaux qui ne finiront jamais), les sanitaires déficients, une petite fontaine pour de nombreux habitants, et déjà deux véhicules de voyageurs, plus pas mal de voitures... Pas vraiment ce qu'on attendait ! Nous y resterons deux nuits quand même, le wifi nous permettant de nous occuper de nos billets d'avion entre autres. La journée, nous ne quitterons guère le fourgon car un orage terrible accompagné de pluies diluviennes va transformer les rues de l'hôtel en torrents et les cours en piscines !

Les pluies ont encore gonflé le fleuve et les habitations misérables sont souvent entourées d'eau. Autour des maisons, des lacs de boue au milieu desquels flottent des tas de déchets, sans doute drainés par la pluie. Sur le pont, des marchands vendent crevettes et gros poissons-chats . Nous aurons la surprise le soir de découvrir que les crevettes ne sont pas fraîches mais salées...

La Colombie présente des similitudes avec le Brésil. Plus on se rapproche de la mer, plus la population est noire, pauvre aussi et plus il y a de poubelles partout. Nous découvrons ici une autre Colombie qui n'a rien à voir avec ce que nous connaissons. Finies les maisons coquettes et fleuries, finis le sol impeccablement nettoyé et les nombreux réceptacles à ordures, finis aussi le sourire et la joie de vivre sur les visages ... Les maisons sont de planches et de plastique, ou quelques parpaings superposés, la cour en terre transformée en boue si ce n'est carrément inondée, des gens qui se traînent, moins de sourires, beaucoup de poubelles.

Nous recherchons toujours notre paradis des Caraïbes, de moins en moins convaincus, mais si nous pouvions au moins trouver un endroit pour jeter l'ancre les deux semaines qu'il nous reste... La pluie, toujours la pluie... A Barranquilla, les rues sont devenues des torrents, et on voit même un panneau routier montrant une voiture emportée par l'eau, en pleine ville !

Petit homme miniature : les couches dépassent du pantalon !

Benjamin, rencontré à Tierradentro et domicilé à Bogota depuis 7 mois, nous avait dit qu'en Colombie, cette année, il pleut tout le temps. Pas de vraie saison sèche. Les habitants nous disent que le temps est détraqué (nous avons entendu cela tout le long du voyage ; d'ailleurs chez nous aussi !) mais ici, cela prend une autre ampleur !

Vente de noix de coco à boire en bord de route.

La pluie gonfle la terre des montagnes provoquant éboulement, glissement de terrain, inondations catastrophiques. Qui a oublié la petite colombienne prisonnière de la boue, vers 1990, dont les médias ont montré à la TV la mort en direct pendant trois jours ? Sa photo en couverture de Paris-Match avait même été primée « photo de l'année ». Une honte...
La nature n'est pas douce pour la Colombie, car à cela il faut ajouter les tremblements de terre( Popayan largement détruite en 1993) et les volcans qui ne sont qu'endormis et dont l'activité est toujours à craindre. On nous a parlé d'une catastrophe, il y a 20 ans ; le réveil du volcan, le Nevado del Ruiz, a fait fondre le glacier provoquant des inondations terribles et la mort de 20 000 personnes.
Pauvre Colombie... quand ce n'est pas la nature qui se déchaîne, ce sont les hommes. Le pays a subi la violence des trafiquants de drogue, des milices et de la guerre civile, des FARC... Pourtant, les colombiens ont un tel sourire, une telle joie de vivre, ils sont si accueillants, si merveilleux.... du moins au sud ! Depuis plusieurs années, la police et l'armée contrôlent mieux le pays et assurent la sécurité des routes. Les touristes étrangers plus confiants se font chaque année plus nombreux. Et c'est bien car vraiment la Colombie est un beau pays où on se sent bien et pas du tout en insécurité !
Pour nous, toujours à la recherche de notre paradis, nous trouvons une plage, un camping sous les cocotiers, devant la mer... presque le paradis ! Nous remarquerons bientôt que le coin est peuplé de ces petites mouches, aussi terribles que minuscules et que nous n'avions trouvées que vers 2000m et au bord des cours d'eau. Très vite, elles auront fait un festin et on commence à se gratter... Pas question donc d'aller lézarder sur la plage, si toutefois le ciel nous l'avait permis, car il pleut toujours.
Quant à la mer, elle est ici déchaînée ! Nous n'avons jamais vu de vagues si hautes et si violentes. D'ailleurs, un panneau indique : courants dangereux. Donc, pas de plage, pas de baignade, balades possibles mais avec Kway, pantalons, chemise à manches longues pour se protéger des mouches. Ah ! J'ai oublié de dire que la température (environ 30°) ajoutée un à air saturé d'humidité, nous fait ruisseler de transpiration de jour comme de nuit !
Et puis, le ciel commence à se calmer, des zones de bleu apparaissent, les petites mouches diminuent sans disparaître toutefois, et le moral remonte ! Nous découvrons l'agréable petite ville de Santa Marta, certes très touristique, mais où il fait bon se promener en bord de mer.
La plage est située entre deux ports. Les grands bateaux chargent et déchargent leurs containers (nous avons bien entendu une pensée pour Antoine qui a vécu cela, sur la route de la Chine, côté bateau). La plage dans la ville montre une activité grouillante !
Nous avons été témoins d'une petite aventure : à côté de nous marche un vendeur de limonade ; son chariot est chargé d'un grand récipient transparent contenant une bonne dizaine de litres d'eau mélangée à du jus de citrons verts, sucre et glaçons, de quelques kilos de citrons verts et de verres en plastique. Les roues de son chariot butent sur le pavé irrégulier et le chariot bascule vers l'avant, renversant le récipient , vidant le jus par terre, tous les citrons roulent sur le sol... Plusieurs personnes se précipitent pour redresser tout cela, pendant que le vendeur, un noir, tombé sur les fesses, ne se relève pas et rit, rit tellement de sa maladresse. Son gagne-pain s'écoule par terre et il rit...
Beaucoup de gens se baignent ; les enfants demandent aux touristes d'envoyer des pièces dans l'eau qu'ils vont chercher en plongeant. On rencontre une nuée de vendeurs de tout, des souvenirs (surtout des « constructions » en coquillages) aux jus de fruits (un délice !) en passant par les cuisines ambulantes, les vendeurs de fruits, de jus de noix de coco, de salades de fruits... Ci-dessous, fruits frais prêts à consommer (papaye, pastèques, mangues) et à droite, fruits pour les jus(zapote, lulo,...)

"Prenons soin de ce parc"
"Ne détruis pas ce qu'avec amour on a construit pour toi"

Nous sommes loin des :"Interdit de marcher sur la pelouse" de chez nous. Les interdictions sont en général accompagnées d'excuses pour le dérangement et rarement indiquées de manière directe. Cela ne change rien au résultat, mais on a tout de suite envie de collaborer.

Le Parc National Tayrona, un des joyaux naturels de la Colombie, nous recevra 4 jours. Quatre jours où nous allons faire des balades en pleine forêt humide (!), nous baigner dans des eaux très claires, même si on ne peut pas se baigner partout. Un panneau affiche : « Sur cette plage, 100 personnes se sont noyées. Voulez-vous faire partie de ces statistiques ? » Un peu plus loin, un autre panneau annonce 200 personnes... Mais nous ne sommes pas des nageurs téméraires et vu les vagues et les courants, nous ne nous y serions pas risqués de toutes façons !
Au petit matin, nous découvrons quelques singes occupés à grignoter des baies en haut des arbres ; nous voyons des crabes de terre qui font de grandes galeries dans la terre boueuse, des crabes avec une carapace bleue, un énorme crabe avec carapace d'escargot (un Bernard L'Hermite ?).
Et puis il y a cette exubérante végétation, la forêt verte, des arbres immenses et très vieux, des lianes démentes et les fleurs, si belles dans cet univers dévorant. La forêt est un lieu magique, indescriptible de mystère, qu'on ne peut photographier vraiment car le recul manque et on ne peut avoir cette vue d'ensemble qui lui donne sa vraie dimension.
Nous rencontrons beaucoup de mille-pattes, très gros, et si chez nous ils ont vraiment 1 000 pattes, ici ils en ont au moins 10 000 !!
Sur les petits bouts de plage où on peut se baigner, l'eau est plus fraîche, plus agréable après la marche. Les marchands de glaces sont présents sur tout le chemin, de boissons aussi. Il faut dire qu'il fait chaud et très humide ; nos chemises semblent sortir d'une machine à laver dont l'essorage serait cassé. Notre dernier jour au parc se passera sur une autre plage.

Nous serons une bonne partie de la journée dans l'eau, et sur la plage à retrouver un peu de bronzage. Nous avons raté l'excursion à la Playa Cristal où l'on peut aller voir coraux et poissons colorés avec masque et tuba. Les informations des marchands visant leurs propres intérêts ne nous ont permis de prendre le bateau à temps. Dommage.

Nous faisons connaissance avec un jeune chilien, en voyage en Amérique du sud depuis 8 mois. Echange très sympathique !

Nous revenons vers Cartagena ; le temps est décidément meilleur maintenant et même s'il pleut parfois, cela n'est guère gênant. Nous avisons une plage à proximité d'une maison et nous y ferons une ultime étape de deux jours. Le retour est très proche maintenant et nous devons nous préparer à quitter l'Amérique du Sud.
Entre deux baignades dans une mer calme à plus de 30°, Klaus démonte la galerie qui devra voyager dans le fourgon (le véhicule rentre juste dans le container, mais sans galerie) ; je range l'intérieur, réunissant les dernières réserves de nourriture (plus grand-chose à se mettre sous la dent...) et me débarrassant de tout ce qui devient inutile en France et fait le bonheur de la famille noire voisine. Puis nous parcourons les 25 derniers km qui nous séparent encore de Cartagena.
Le Volcan del lodo de Totumo est assurément une curiosité ! Son cône de 10 mètres de hauteur aura nécessité 2 000 ans pour se constituer! Il s'agit en fait d'un geyser de boue qui bouillone à peine, et la boue se déposant sur les bords aura progressivement construit le cône. Il existe d'autres cônes mais le cratère étant beaucoup plus petit, ils ne sont pas exploités pour le tourisme.

Le cratère, un carré de 4 mètres sur 4, contient de la boue aux vertus médicinales reconnues. On y descend par une petite échelle et... on flotte ! Il n'y a pas de fond... en dessous de soi, il y a la boue, peut-être jusqu'au centre de la terre ? La densité de la boue est telle que l'on ne parvient que difficilement à s'y enfoncer un peu en s'appuyant fortement au bord en bois.

Progressivement, les touristes arrivent. La veille, en fin d'après-midi, ils étaient très nombreux !

La boue n'est pas agressive mais très douce. Klaus met sans problème sa tête dedans à plusieurs reprises.

Nous avons passé la nuit sur le parking et sommes les premiers à pénétrer dans la boue le matin. Sensation très étrange car on ne sait pas à quoi s'attendre et quand on lâche l'échelle... on reste debout avec la boue jusqu'à hauteur de la poitrine. Klaus fait une planche (facile) pour permettre au masseur de faire son travail.

On va ensuite se laver dans l'eau du lac immense situé à quelques dizaines de mètres du cratère.

Nous ressentons un grand bien-être qui met en forme pour la journée !

Pour mieux la protéger a été édifié sur une petite colline avoisinante le Castillo San Felipe, imposante construction fortifiée quasiment imprenable. Au système de fortification sophistiqué, s'ajoutait un allié naturel : les marais infestés de moustiques porteurs de fièvre jaune et de malaria. Les canons du fort obligeaient les assaillants éventuels à rester confinés dans cette zone de marais et le temps faisait son œuvre destructrice. Seuls des corsaires français ont réussi à y pénétrer mais leur assaut a été facilité par une garnison totalement démotivée qui n'avait pas envie de se battre pour le roi d'Espagne du moment, malade et débile.
Après l'Indépendance, vers 1820, les espagnols ont voulu reprendre Cartagena. Ils ont commencé un siège qui, pensaient-ils, ne durerait pas plus d'un mois. Pour déjouer l'influence néfaste des marais, ils avaient enrôlé des soldats dans les îles voisines, habitués au climat et peu sensibles aux maladies transportées par les moustiques. Sans doute la population de Cartagena n'avait pas conservé le meilleur souvenir des espagnols... Pauvres et riches, unis par une même cause, résistèrent quatre longs mois !
CARTAGENA est une des plus grandes villes du pays avec plus d'un million d'habitants. On la dit la plus belle ville d'Amérique du sud. Si Cartagena a toujours été convoitée par les anglais, les hollandais, les français, les corsaires et les pirates, elle n'a pas subi, comme beaucoup de villes du continent, de catastrophes naturelles, séismes ou éruptions volcaniques. La cité historique est entourée de remparts.
La ville historique de Cartagena dont les remparts longent le bord de mer, est un petit bijou. Les rues sont étroites et résonnent du pas des chevaux des nombreuses calèches qui emmènent le touriste pour une visite guidée de la ville. Les maisons colorées sont agrémentées de jolis balcons, la plupart en bois.
La ville est animée et de nombreux vendeurs de fruits préparés en salade ou en jus, de peintures, de souvenirs divers et de toutes les bricoles que l'on peut proposer au touriste sillonnent les rues. Le soir, des groupes de danseurs présentent leur spectacle sur la place, tandis qu'à côté un prédicateur crie dans son micro pour tenter de convertir des passants qui ne l'écoutent même pas....
Partout en Colombie, on trouve de nombreux vendeurs de "tinto", le café de Colombie. Ils sont équipés de plusieurs bouteilles thermos contenant café, déca ou non, lait et eau chaude ; du sucre , des gobelets et l'inévitable petite paille faisant office de petite cuillère. Ils parcourent la ville, proposant leur précieux breuvage (un peu trop clairet à notre goût...) Lorsqu'une averse diluvienne accompagnée d'un tonnerre résonnant dans les rues s'abat sur la ville, tout le monde se réfugie sous les arcades.
On n'entend alors plus que l'appel des vendeurs de parapluies : « Paraguaaaaa ! » La chaleur règne sur la ville, une chaleur très humide, qui nous oblige à nous retrancher souvent dans notre chambre d'hôtel climatisée, d'autant plus que nous sommes assez fatigués, obligés chaque jour de nous lever très tôt pour les formalités d'envoi du fourgon.
Dés que la nuit tombe, peu après 18h, les boutiques ferment l'une après l'autre, les vendeurs des rues se retirent, et quand à 20h nous cherchons un restaurant, nous nous retrouvons dans une ville morte. La même chose quand nous quittons notre hôtel à 6h30 le matin.
Nous passons les trois dernières nuits à l'hôtel et faisons les formalités du départ. Le jeudi, nous amenons le fourgon pour le mettre dans le container. Les formalités de douane se limitent à la vérification du numéro de châssis. Le vendredi est prévu le contrôle anti-drogue. La veille, la télé montrait qu'un container abritant 12 tonnes de cocaïne venait d'être saisi ; en fait il y avait surtout du sucre brunc au milieu duquel étaient quand même dissimulés 19 kg de drogue !
Quand les espagnols entrèrent dans la cité, 7 000 des 12 000 habitants étaient morts de faim. Au fort San Felipe, les 500 soldats n'étaient plus que cadavres couchés sur leur canon. Cocorico ! C'est un français qui a permis plus tard aux cartagenois de repousser les espagnols hors de la ville, et peut-être même du pays, et ce, de manière définitive !
Le contrôle est annulé le vendredi et remis au samedi. Aïe ! C'est le jour où nous devons prendre l'avion ! Le Senor La Rota, très conscient que nous allons être très juste en temps, vient nous prendre dés 6h30 à l'hôtel. C'est qu'il faut être à la disposition des brigades anti-drogue et attendre, attendre... Finalement cela ira assez vite ; enfin, façon de parler car comme on m'interdit l'accès au port, Klaus doit vider seul l'ensemble du véhicule, et le ranger ensuite bien entendu. Tout cela dans une chaleur terriblement humide ; de mon côté, rester sous les ventilateurs de la cafétéria n'aura été pénible que par l'angoisse de l'attente. A 11h30, tout est fini, nous sautons dans un taxi qui nous emmène directement à l'aéroport.

"Colombia,

le seul risque,

c'est vouloir rester"

Chao Colombia !

Chao America del Sur !

Ahora, volvemos a Francia !

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